(trad. fr. a cura di Maria Assunta Mini) - versione italiana
Ce ne sont pas tous les Algériens qui l’aiment. Des anciennes camarades de militantisme et des anciens camarades de parti utilisent à son égard des tons sarcastiques : “Qu’est-ce qu’elle a fabriqué cette fois la rouquine?”, demandent-ils. Ils l’accusent d’avoir trahi les luttes féministes et démocratiques pour se compromettre avec un pouvoir liberticide et conservateur. Mais ils parlent d’elle. Elle, Khalida Toumi, Ministre de la culture algérienne depuis 2002, est en effet un personnage connu, populaire, un sujet politique au centre de beaucoup de phrases, dans la presse, dans les salons de la culture et dans les conversations informelles. Même les enfants la connaissent: pendant qu’ils courent après un ballon sur une placette qui domine la baie d’Alger, ils reconnaissent un profil familier et tout de suite demandent si ce profil est celui de leur Ministre (ouazira).
Et elle rend l’attention en s’offrant souvent au public. Elle vient de rentrer d’Annaba, à l’extrême est du pays, où elle a fêté l’ouverture de structures d’accueil pour les anciennes combattantes de la guerre de libération avec le Ministre des moudjahiddin, elle est présente à plusieurs initiatives sectorielles dans les différentes régions du pays, elle participe à des émissions télévisées et radiophoniques nationales. Et, pendant qu’elle nous parle, elle s’interrompt pour répondre à un appel du Ministre de l’éducation au sujet de quelques initiatives conjointes pour rapprocher les enfants des livres et de la lecture, y compris un nouveau prix réservé au meilleur petit lecteur.
Comme Ministre de la culture son attention est attirée par quelques urgences du secteur, parmi les plus touchés par la décennie du terrorisme: au centre ville, le palais qui devrait accueillir en 2007 le premier musée algérien d’art moderne et contemporain, est encore couvert de poussière; un peu plus loin, à l’Ecole Nationale des Beaux-Arts, une fracture difficile entre étudiants, enseignants et administration reste à résoudre. Comme pour répondre à ses détracteurs, ses réflexions sont toutefois consacrées à d’autres questions: avant tout, la distinction entre laïcité et féminisme. “Etre laïcs – dit-elle – ne signifie pas automatiquement défendre les droits des femmes”.
“J’en suis convaincue par évidence historique – explique la Ministre Toumi-. Par exemple, votre histoire, l’histoire de l’Europe, est riche en revendications à caractère laïc qui ont cautionné et pratiqué l’oppression des femmes. Le cas le plus évident est celui de la révolution française. Les révolutionnaires nièrent violemment l’accès au pouvoir politique aux femmes, qui avaient pourtant participé à la révolution. Olympe De Gouges rédigea la “déclaration des droits de la femme et de la citoyenne” (juillet 1790) s’inspirant de la “déclaration des droits de l’homme et du citoyen” de 1789, elle écrit que si la femme a le droit de monter à l'échafaud, elle doit avoir également celui de monter à la tribune: elle fut guillotinée deux ans plus tard. Les femmes pouvaient donc être des combattantes de la révolution mais pas des citoyennes de République. Ce ne fut que le début de plus d’un siècle d’injustices perpétrées par les laïcs contre les femmes, parce que même quand la France adopta sa célèbre réforme pour une école laïque, en 1905, les droits de citoyenneté des femmes tardèrent beaucoup à être reconnus; elles n’obtinrent le droit de vote qu’en 1944, après d’âpres polémiques.
D’autre part, je suis convaincue que laïcité et féminisme avancent sur des voies indépendantes sur la base de ce qui s’est passé dans l’histoire de notre religion. Au début de l’Islam, les femmes ont reçu un traitement exceptionnel. Aïcha, l’une des femmes du prophète, a été protagoniste d’une bataille constante pour l’accès des femmes aux plus hautes sphères du pouvoir. Quand l’Europe vivait ses “siècles sombres”, Aïcha dirigeait une armée”. La chercheuse et écrivain marocaine Fatima Mernissi a très bien documenté, à mon avis, le rôle politique de premier ordre des femmes au début de l’Islam.
A partir de cette solide conviction que l’histoire de la libération des femmes est distincte de la laïcité, quels sont les objectifs que vous vous êtes fixés une fois arrivée aux sommets politiques de l’Algérie?
“Je me suis demandée ce que je pouvais faire pour améliorer la condition des femmes. J'avais devant moi un code de la famille à réformer et deux options parmi lesquelles choisir. La première était la revendication d’une loi civile, sans compromis. Si j’avais persévéré dans ce sens, j’aurais été une femme qui trahissait les autres femmes en hommage à un parti laïc. J’ai donc choisi de rester du côté des femmes et de voir ce que je pouvais faire pour elles dans cette conjoncture historique, en mettant en deuxième plan les exigences du parti laïc, parce que – que cela soit clair – moi je ne suis la femme de ménage d’aucun parti laïc”.
Le résultat?
“Les transformations auxquelles j’ai contribué pendant ces dernières années restent inscrites dans le cadre d’un code à inspiration religieuse, d’un code inspiré à l’Islam, mais la condition de la femme s’est améliorée. Le code de la famille et le code de la nationalité adoptés en mars 2005 sont très loin de ceux qui étaient en vigueur avant. Aujourd’hui, il n’est plus permis de jeter une femme à la rue après le divorce. Aujourd’hui, les mères exercent l’autorité parentale sur leurs enfants au même titre que les pères. L’obligation d’obéissance au mari a été supprimée, les époux ont les mêmes obligations réciproques. La polygamie est devenue pratiquement impossible. Le code de la nationalité a été révolutionné, la nationalité algérienne d’origine est reconnue par filiation maternelle en cas d’union avec des étrangers et, d’autre part, il est possible d’acquérir la nationalité suite au mariage soit avec un Algérien qu’avec une Algérienne.”
Acceptant des compromis politiques pour défendre les droits des femmes, avez-vous dû modérer vos tons et «adoucir » vos positions par rapport à la période du militantisme?
“J’ai été une militante pour défendre plusieurs idées. J’ai milité pour la démocratie, un système de gouvernement, le meilleur pour le moment, mais qui est aussi très fragile, comme vous les Italiens le savez très bien. J’ai milité pour les droits des femmes. J’ai milité pour changer le système éducatif. Et j’ai lutté pour endiguer le pouvoir excessif du marché et garantir une gestion sociale de l’école, de la culture et de la santé.
Un jour, le parti où je militais a décidé de faire un pacte avec l’armée et opérer un coup d’Etat. J’ai été contraire et j’ai été expulsée. J’étais dans cette situation quand on m’a proposé le poste de Ministre. Je savais que j’allais entrer dans un gouvernement mixte et que je devais lutter et souffrir, mais j’ai préféré le compromis avec le gouvernement pour essayer de changer les choses au militantisme dans un parti laïc favorable à un coup d’Etat militaire et fermé dans sa politique de salon.
Or, si vous me demandez si j’ai réussi à changer les choses, je vous dis encore une fois que la condition des femmes s’est améliorée et que, avec le Ministre de l’éducation qui vient de m’interpeller, je suis en train d’essayer de porter la culture dans les écoles et d’ouvrir les horizons des enfants algériens. Il faudra peut-être vingt ans, mais j’ai confiance en mon peuple”.
Sa position contredit le scepticisme de la communauté internationale qui continue à nourrir des doutes sur la nature démocratique de l’Etat algérien et du gouvernement dont vous être membre...
“Si dans n’importe quel gouvernement européen entrent des femmes, la communauté internationale se réjouit pour la maturation du système démocratique. Si, par contre, une femme entre dans le gouvernement d’un pays arabe, la communauté internationale ne manifeste que des doutes.
C’est le symptôme d’un racisme larvé. Et de mépris. C’est une conception du monde selon laquelle les femmes du monde arabe seraient soumises par la force des choses. La même conception selon laquelle il revient à quelques Etats occidentaux et à leurs establishments politiques, économiques et intellectuels de décider de la justesse des choix et des actions du reste du monde. L’Occident s’arroge le droit de tout définir et de distribuer des certificats de qualité politique et intellectuelle, dans une dynamique auto-référentielle qui transforme en fait le dialogue en un monologue. Cela – je le répète – s’appelle racisme”.
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